|
« De nombreuses études attestent l’effet déterminant des
pratiques pédagogiques des enseignants dans la réussite des élèves. »
|
Cette déclaration est a priori remarquable et innovante pour
utiliser un terme que le ministère affectionne ! Dommage que nous ne
sachions pas exactement quelles sont ces études ni ce que le ministère en
tirera comme conclusion.
|
« Faire évoluer les pratiques pédagogiques par la mise en place
du dispositif “plus de maîtres que de classes” »
|
Le fameux changement des pratiques pédagogiques est enfin
dévoilé : un maître supplémentaire par classe.
|
« Dans ces écoles, un renforcement significatif et ciblé de
l’encadrement dans les premières classes de l’école primaire devrait
permettre des pratiques pédagogiques renouvelées et d’accroître la
performance d’acquisition de la lecture et de l’écriture. »
|
Petit bémol à la déclaration précédente : cela concerne les
ZEP. Un maître de plus par classe dans ces endroits est une excellente
chose et je parle en connaissance de cause.
Mais il est abusif de laisser entendre que cela renouvellera les
pratiques pédagogiques.
Sait-on vraiment ce qu’est une pratique pédagogique au
ministère ?
On pourrait mettre une dizaine d’enseignants, s’ils utilisent une
méthode inefficace, la lecture ne s’améliorera pas pour autant…
|
« La politique de réussite éducative pour tous les élèves doit
s’accompagner de marges de manœuvre en matière de pédagogie afin de
donner aux équipes locales la possibilité de choisir et
de diversifier les démarches. »
|
Confirmation de la liberté pédagogique. Quelle largeur pour ces
marges de manœuvre ?
|
|
« … La formation continue enfin qui est indispensable pour
permettre aux enseignants de rester au contact de la recherche, des
avancées dans leur discipline ainsi que des évolutions qui traversent les
métiers de l’éducation et la société. »
|
Nous avons hâte de connaître cette recherche. Espérons que tous les
grands travaux sur l’efficacité des méthodes seront enfin portés au grand
public, par exemple.
|
|
« La recherche sera au cœur des enseignements qui seront
dispensés au sein des ESPE. »
|
On rêverait d’une formation initiale qui présenterait l’ensemble des
méthodes pédagogiques au regard de leurs efficacités respectives auprès des
élèves.
Est-ce à dire que les données probantes vont enfin avoir droit de
cité dans l’enseignement ?
|
|
« Enfin, il convient de poursuivre la réduction progressive du
nombre de redoublements car il s’agit d’une pratique coûteuse plus
développée en France que dans les autres pays et dont l’efficacité
pédagogique n’est pas probante. »
|
On soulignera l’honnêteté de l’affirmation. Les enjeux financiers du
redoublement étaient en effet un secret de polichinelle. Il est vrai que
l’efficacité du redoublement n’est pas prouvée pas plus que celle du passage systématique.
|
|
« Les modalités de la notation des élèves doivent évoluer pour éviter
une notation sanction à faible valeur pédagogique et privilégier une
évaluation positive simple et lisible, valorisant les progrès,
encourageant les initiatives et compréhensible par les familles. »
|
Il s’agit simplement d’éradiquer la notation chiffrée, supposée
traumatiser les élèves (et leurs parents) n’ayant pas des 20/20.
Autant les encouragements positifs sont indispensables dans la
conduite pédagogique, autant l’évaluation positive dont il s’agit ici
risque de tourner à la mascarade démagogique destinée à faire croire
à chaque élève et à ses parents qu’il réussit. Le meilleur moyen d’effacer
l’échec n’est-il pas de casser le thermomètre ?
Quant à la lisibilité des évaluations pour les parents, ce serait
une excellente chose, mais encore faudrait-il savoir ce qui est entendu par
« lisibilité ».
|
|
« Les enquêtes internationales montrent qu’ils (les élèves)
sont non seulement loin de maîtriser les compétences (en langues) attendues
en fin de 3ème, mais surtout qu’ils arrivent en dernière position de
l’ensemble des élèves européens évalués pour la maîtrise de ces
compétences. »
|
Au vu des évaluations internationales, on ne pouvait plus nier le
piètre niveau en langues des élèves français. Ce serait peut-être
l’occasion de s’interroger sur la qualité de cet enseignement, en primaire
mais surtout dans le secondaire, où il occupe une place plus importante.
|
« Une langue vivante dès le cours préparatoire. La
précocité de l’exposition et de l’apprentissage en langue étrangère est un
facteur avéré de progrès en la matière. »
|
L’affirmation de ce principe est louable.
Mais si l’on se cantonne à cela sans s’interroger sur la qualité de
l’enseignement dispensé, y compris au collège, cela restera un emplâtre sur
une jambe de bois.
|
|
« Assurer la progressivité des apprentissages de la
maternelle au collège. »
|
Je me fais plaisir en m’imaginant qu’il s’agit du principe de base
de l’enseignement explicite : enseignement progressif, du simple au
complexe, ne passant pas à l’étape suivante tant que la précédente n’est
pas acquise. On peut rêver après tout …
|
« La mise en place des cycles, effective en principe
depuis plus de vingt ans, a été peu mise en œuvre et n’a pas conduit à
la progressivité nécessaire des apprentissages. »
|
Traduction : la mise en place des cycles a été un fiasco. Non
parce que l’idée n’était pas bonne, mais parce que les enseignants ne l’ont
pas appliquée. Tout est dans la nuance.
|
« La politique des cycles doit être relancée. »
|
Traduction : la politique des cycles a échoué, donc il faut la
relancer.
On aurait espéré un esprit plus dynamique (voir les travaux de
Carol Dweck) :
cela aurait consisté à tirer profit de l’erreur pour s’orienter vers une
autre solution. Quand je pense que les mêmes nous serinent que l’erreur
doit être source d’enseignement.
|
Création d’un « cycle associant le CM2 et la classe de 6ème. »
|
Les cycles ne fonctionnaient déjà pas quand toutes les parties étaient
dans une même école, alors à cheval sur des écoles et un collège, je vous
laisse imaginer.
Quant aux professeurs du secondaire, je les entends déjà railler
cette infâme « primarisation du collège ».
|
|
« Neuf demi-journées de classe. La matinée
d’enseignement supplémentaire prendra place le mercredi, sauf dérogation
sollicitée auprès des autorités académiques. »
|
Est-ce que les têtes pensantes ont songé aux temps partiels, aux
compléments de décharge des directeurs, aux remplacements. Et que se
passera t-il quand des écoles d’une même circonscription auront un emploi
du temps différent ?
On n’a pas encore inventé le logiciel informatique qui pourra gérer
tout cela, et ce n’est pas l’Éducation Nationale qui le fournira. Mais tout
cela relève de l’expérience de terrain, alors…
|
|
« Ces technologies peuvent devenir un formidable moteur
d’amélioration du système éducatif et de ses méthodes pédagogiques, en
permettant notamment d’adapter le travail au rythme et aux besoins de
l’enfant, de développer la collaboration entre les élèves, de favoriser
leur autonomie, de rapprocher les familles de l’école, de faciliter les
échanges au sein de la communauté éducative. »
|
Bla, bla, bla.
Les nouvelles technologies ne sont qu’au service des pratiques
pédagogiques. Ce ne sont pas des objets magiques, ni des gadgets pour
« rendre l’école plus attrayante » (propos du ministre,
entretien sur RTL).
Sans des méthodes efficaces, les TICE ne sont rien.
Au service des méthodes efficaces, elles augmentent encore
l’efficacité.
|
« … créant un nouveau service public : le service public
de l’enseignement numérique.
Ce service permet d’enrichir l'offre des enseignements qui sont
dispensés dans l’établissement et de faciliter la mise en œuvre d'une
pédagogie différenciée.
|
J’aimerais bien avoir un job dans ce service.
Pourquoi une pédagogie différenciée ? Qui a montré que c’était
plus efficace ? Voir ici
|
Des ressources et des services numériques seront mis à la
disposition des écoles et
des établissements scolaires pour prolonger les enseignements qui y sont
dispensés et leur permettre de mieux communiquer avec les familles. »
|
On connaît les limites des services proposés par l’Éducation
Nationale : usines à gaz, peu conviviales et peu stables.
|
« Un réseau social professionnel offrira aux enseignants une
plateforme d’échange et de mutualisation. »
|
Le mot est lâché : MUTUALISATION. On ne peut pas reprocher aux
enseignants de faire leur métier de manière insatisfaisante et en même
temps leur demander de mettre en commun leurs ressources.
Que l’on me cite un autre métier faisant appel à la
mutualisation ? Et pourquoi pas le bricolage aussi ?
|
« Un effort important dans le domaine de la recherche et
développement sera conduit pour développer des solutions innovantes
en matière d’utilisation du numérique pour les apprentissages fondamentaux.
Cet effort visera notamment à développer une filière d’édition numérique
pédagogique française. »
|
Autre mot fétiche : INNOVATION.
Un principe intangible dans l’Éducation Nationale : ce qui est
nouveau est bon. Pourquoi ne pas dire simplement : création d’une
filière d’édition numérique ?
Si cela voit le jour, ce sera une bonne chose car les ressources
manquent et les éditeurs papier n’ont pas encore compris que c’est
l’avenir…
|
|
« La participation des parents à l’action éducative est un
facteur favorable à la réussite de leurs enfants. Il convient de leur
reconnaître une place légitime au sein de la communauté éducative.
La “co-éducation” doit trouver une expression claire dans le système
éducatif « comme le souhaitent les parents. »
|
Tout comme si les parents n’avaient pas déjà une place de taille
dans le système éducatif : ils prennent les décisions pédagogiques
(ex : redoublement) sont membres des conseils d’école, ne se privent
pas de dire leurs avis sur les pratiques pédagogiques des enseignants. Mais
puisqu’il est question de co-éducation, pourquoi ne pas leur demander
d’éduquer leurs enfants d’une manière favorisant les apprentissages
scolaires et les valeurs transmises à l’école : respect, politesse,
sens de l’effort ?
|
« Les familles doivent être mieux associées aux projets
éducatifs d’école ou d’établissement »
|
Pourraient-ils l’être davantage qu’ils ne le sont déjà ? Oui,
en leur demandant de faire classe à notre place, ou plutôt de nous
expliquer les contenus et les manières de faire. Et en nous tenant lieu
d’inspecteurs…
|
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires sont modérés. Ne seront retenus que ceux qui sont en rapport avec le sujet, clairement énoncés, courtois, et non injurieux.