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dimanche 26 mai 2013

Une obole pour les enseignants du Primaire



L’ISOE ou Indemnité de Suivi et d’Orientation des Elèves ISOE est une indemnité versée à tous les enseignants du secondaire pour les charges de travail relatives à l’évaluation, au suivi des élèves et pour la participation aux réunions. Elle varie de 1230.96 € à 1609.44 € (source). Cette indemnité a été octroyée depuis la loi Jospin de 1989, dans le cadre de la revalorisation de la carrière des enseignants.

Les enseignants du Primaire n’ont pas eu droit à cette prime bien qu’ils soient soumis à la même charge de travail supplémentaire (évaluation, suivi, réunions). On a considéré que leur salaire couvrait déjà cette tâche.  À l’époque, cela est passé inaperçu.

En février 2013, suite aux résistances provoquées par le projet de refondation de l’École, notre ministre Vincent Peillon, évoquait qu’il "serait envisageable" de rattraper cette injustice par une prime annuelle « d’environ » 400 €. Les optimistes n’ont entendu que le montant de la somme, les réalistes n’ont entendu que le conditionnel redondant de l'expression serait envisageable.

Aujourd’hui, le ministre désire faire signer un protocole d’accord aux syndicats prévoyant « La création d’une indemnité au bénéfice des enseignants du premier degré visant à reconnaître des missions qu’ils accomplissent au titre du suivi et de l’évaluation des élèves » et pour « l’adaptation du temps de travail aux besoins du service - temps de travail des enseignants remplaçants et en postes fractionnés ».

Les réalistes avaient raison. Vincent Peillon a annoncé le 28 avril que l’indemnité friserait plutôt les 90 € par an, soit environ 7 € par mois. Mais il a une excuse, c’est « un effet de la crise » précise-t-il. Ce qui ne l’empêche pas d'ajouter que « la revalorisation des enseignants du primaire reste une priorité ». Dieu merci, que serait-ce donc si elle ne l’était pas ?

Il y aurait bien une solution. Elle consisterait à travailler pour 7 €. Considérant que l’heure d’enseignement d’un PE est évaluée à 24.28 €,  7 €  représenteraient 17 minutes par mois. Chiche ?

J’évoquais dans mes deux précédents posts les raisons de la désaffection pour le métier d’enseignant. Je doute que cette aumône soit de nature à susciter un nouvel engouement. Les belles paroles ne bernent plus personne et cette somme de 7 € par mois ressemble plus à une obole consentie à contrecœur, qu’à la rémunération d’un personnel tenu en estime [1] et à la volonté sincère de refaire de l'École une institution de qualité.


Françoise Appy

[1] «… nous souhaitons manifester à tous les personnels de l'éducation nationale l'estime et la confiance que nous vous portons… » Lettre de Vincent Peillon à tous les personnels de l’Education Nationale

vendredi 24 mai 2013

Les conditions du métier d’enseignant en Primaire aujourd’hui

Ce billet fait suite au précédent. J’ai reçu en privé un message émanant d’une enseignante offusquée par mes propos ; elle y a lu une diatribe contre le corps enseignant et contre elle en particulier, bien que je ne la connaisse pas. Mais il en va souvent ainsi en lecture : on a la faiblesse de croire que l’auteur écrit en pensant à nous personnellement. Même si l’anecdote est insignifiante en soi, il me semble utile de préciser en quoi la liste précédente reflète bel et bien la détérioration des conditions d’exercice du métier. Cette personne, et peut-être d’autres avec elle, aurait dû aller jusqu’à la conclusion de mon billet qui disait : « Cette liste n’est pas destinée à dénigrer l’acte d’enseigner en soi, qui à mon avis est une tâche passionnante, mais à pointer les conditions d’exercice de ce métier qui, au fil des ans, se sont exagérément dégradées, à tel point que d’aucuns gémissent aujourd’hui sur une « crise des vocations »,sans toutefois essayer d’en trouver les raisons. » Je précise par ailleurs que je suis moi-même enseignante en activité et si je dénonce les conditions du métier, c’est parce qu’elles me touchent quotidiennement depuis longtemps et qu’elles nuisent au bon exercice de la pratique. J’ai créé ce blog pour faire connaître l’Enseignement Explicite, mouvement pédagogique qui s’inscrit dans la recherche d’efficacité observable ; tout ce qui entrave l’exercice de cette efficacité mérite d’être dénoncé. Par conséquent, je persiste et je signe.

Voici donc quelques compléments d'information.

Un métier devenu pénible au fil du temps et une pénibilité non reconnue : les comportements des élèves ont changé et les classes difficiles sont devenues monnaie courante y compris dans des zones non réputées difficiles. Phénomène aggravé par un changement d’attitude des familles vis-à-vis de l’école. Face à ces mutations, aucun moyen supplémentaire n’a été mis en œuvre, l’autorité professionnelle de l’enseignant, au moment même où il aurait fallu la renforcer, a été amoindrie et l’ingérence pédagogique des familles encouragée. Les tailles des classes restent inchangées et les mêmes sempiternelles et inefficaces recettes sont appliquées. Quand des jeunes enseignants se trouvent face à une classe de 25 « sauvageons » ingérables, 6 heures par jour, et qu’ils consacrent toute leur énergie à pacifier le groupe, ils n’enseignent pas. Qui s’en soucie ? Et dans quel état physique et psychologique rentrent-ils chez eux le soir ?

D’autres pressions émanent d’une hiérarchie trop souvent tatillonne qui, au lieu de se pencher sur les résultats, se complaît à vérifier la conformité au dogme pédagogique, et semble se délecter d’une bureaucratisation maintenant poussée à l’extrême, le tout ponctué d’une impressionnante épidémie de réunionite aiguë dont l’utilité reste aussi à démontrer.

La société ne respecte plus son école ni ses enseignants. C’est logique à défaut d’être normal ; c’est ce qui se produit quand le salaire est très bas, que l’autorité professionnelle est érodée et que n’importe qui peut venir mettre en doute la pratique de l’enseignant.

Quant au salaire, j’observe depuis de nombreuses années que c’est une question taboue dans le milieu enseignant, y compris chez certains syndicats. On vous rétorquera facilement qu’on « ne fait pas ce métier pour l’argent » ! A croire qu’une grande majorité d’entre nous ne pensent pas mériter leur salaire. Ou alors se situent dans une véritable « vocation ».Il est clair que ce trait de mentalité permet au ministère de jouer sur du velours. Pourquoi augmenterait-il des personnes pour qui l’argent n’est qu’un détail, et qui s’épanouissent dans le bénévolat ? Malgré tout, considérant que l’âge moyen de l’entrée dans le métier est actuellement de 28 ans avec un niveau d’études master 2, je comprends que les candidats ne se bousculent plus. Les enseignants du Primaire touchent à peine 73% de ce qu’ils auraient perçu dans une autre profession à diplômes équivalents. Les salaires ont diminué de 8% en prix constants depuis une dizaine d’années. Mais qui songe à compter ? Pour rester dans l’aspect financier, est-il normal que l’on vous impose la participation à des journées de formation hors de votre lieu d’exercice sans vous rembourser les indemnités de déplacement ?

Sur le plan pédagogique, je pourrais évoquer aussi l’exercice de la liberté pédagogique qui, dans certains cas, peut relever de la performance, tant les pressions sont pesantes pour imposer à tous le dogme constructiviste. Mais aussi la formation initiale ou continue dont il est évident qu’elle est incapable de former efficacement. Les élèves maîtres en font l’expérience dès qu’ils ont charge de classe et prennent conscience des limites de la formation reçue. Enfin, que dire de ce malaise dont on parle peu et qui s’appelle la culpabilisation. Quand un enseignant réussit, c’est parce qu’il a la chance d’avoir de bons élèves, quand il échoue, c’est de sa faute et de sa faute seule. On ne va pas le lui dire aussi directement, on va le lui faire comprendre, l’insinuer, faire en sorte qu’il se remette en question mais sans jamais lui donner de véritables moyens pour s’améliorer. Beaucoup d’enseignants souffrent de cette solitude et se remettent en cause en permanence.

Tout cela constitue un environnement de travail peu propice à l’efficacité mais par contre susceptible d’alourdir la pénibilité du métier. On s’intéresse souvent au bien-être des enfants, rarement à celui des enseignants, et pourtant il y a véritablement un malaise dans la profession qui justifie entièrement la désaffection générale. Suivre toutes ces années d’études pour un métier si peu reconnu, si mal payé et si contraignant ? Mieux vaut y réfléchir à deux fois.

Voir aussi sur la question le dossier spécial sur Form@PEx.


Françoise Appy

jeudi 23 mai 2013

Les qualités de base pour devenir enseignant en primaire aujourd’hui


Avoir une excellente santé physique : l’âge moyen des débutants étant de 28 ans,[1] le nombre d’annuités nécessaires étant de 42 ans, cela signifie une fin de carrière à l’âge de 70 ans. Dans ces conditions, compte tenu de la pénibilité du métier, mieux vaut être en bonne santé. Ne comptez pas sur la médecine du travail pour veiller sur vous car elle est totalement absente du système.

Avoir une excellente santé psychique : celle-ci vous permettra de résister aux multiples pressions et harcèlements émanant des élèves, des parents d’élèves et de la hiérarchie réunis. Quand vous vous ferez insulter, prendre à parti, voire agresser, quand votre professionnalisme sera remis en question, ainsi vous ne craquerez pas et vous saurez faire la part des choses.

Avoir des revenus complémentaires confortables : en effet, le salaire est si bas qu’il ne permet pas à l’heure actuelle de faire vivre correctement une famille; les augmentations de salaire ne couvrent pas celles du coût de la vie et le pouvoir d’achat s’amenuise considérablement d’une année sur l’autre. Si vous n’avez pas ce genre de ressource complémentaire, alors, il est impératif d’avoir des besoins modestes et de se plaire dans une vie simple et rustique. Quelques jours par an de vacances en camping par exemple, devraient vous suffire.

Avoir une personnalité particulière : 

  • être docile et malléable : indispensable pour appliquer les réformes successives qui de toute éternité vont dans le sens d’une complication des conditions de travail des enseignants.

  • être crédule : tenir pour vrai les dogmes et mythes pédagogiques dispensés, sans jamais les remettre en question, même devant le manque de résultats chez les élèves. S’imaginer que l’on est reconnu dans son métier quand on l’exerce correctement. Car, si les élèves n’ont pas de résultats vous serez remis en cause, s’ils en ont, on dira que les élèves étaient bons.

  • Ne pas avoir d’ambition de carrière : une fois qu’on est enseignant, on le reste. De toute façon, si on quitte le métier, on ne sait rien faire d’autre.[2]

  •  être mobile : ne pas redouter des postes fractionnés imposant de longs trajets.


 être sensible à la flatterie : tenir pour vraies des déclarations officielles du type « vous avez été revalorisé », « enseignants, je vous aime » ou encore « dans l’école de demain, vous serez mieux rémunérés ».

Être sa propre ressource en tout lieu et en toutes circonstances. Comme dit la sagesse populaire : « Si tu cherches une main secourable, tu la trouveras au bout de ton bras. » Les enseignants en difficulté ne doivent compter sur personne pour une aide efficace. Au mieux, ils seront inondés de conseils qui ne feront que les enfoncer, au pire, ils seront culpabilisés pour leur manque de savoir-faire. Mais cela veut dire aussi pallier les insuffisances matérielles du système : se débrouiller quand les budgets sont serrés, savoir gérer la pénurie matérielle.

Aimer la solitude. Contrairement aux apparences, l’enseignant est seul. Seul dans sa classe face aux élèves, (mais ce n’est pas là, la pire des solitudes), seul face aux parents d’élèves, seul face à sa hiérarchie, seul face à l’image négative que lui renvoie la société. Contrairement au discours officiel qui prône le travail d’équipe, l’enseignement est un métier très individualisé.

Croire qu’il suffit de vouloir pour pouvoir. Par exemple, prendre en charge des élèves à profil spécifique, sans avoir été formé pour cela.

Être versé dans le bénévolat : travail supplémentaire hors des heures de présence, remboursement aléatoire des frais de déplacement lors des stages ou journées de formation.

Cette liste n’est pas destinée à dénigrer l’acte d’enseigner en soi, qui à mon avis est une tâche passionnante, mais à pointer les conditions d’exercice de ce métier qui, au fil des ans, se sont exagérément dégradées, à tel point que d’aucuns gémissent aujourd’hui sur une « crise des vocations »,sans toutefois essayer d’en trouver les raisons.
Si néanmoins vous vous reconnaissez dans ce descriptif, alors n’hésitez pas et postulez immédiatement. Il paraît que l’on recrute à l’Educ Nat’.


Françoise Appy




[1] Moyenne relevée en 2011.
[2] Un bémol toutefois : il existe à l’heure actuelle une association d’aide aux professeurs qui veulent quitter le métier http://www.aideauxprofs.org/index.asp?affiche=Accueil.asp

dimanche 19 mai 2013

La patience, une habileté à développer


Le dernier billet de Daniel Willingham s’intitule : The 21st century skill students really lack.
Il veut parler de l’attention et de la capacité à se concentrer sur un sujet. Les enseignants le savent bien, les élèves sont impatients et s’ennuient facilement.
D.W. souligne bien que si les jeunes aujourd’hui sont incapables d’être attentifs, ce n’est pas par inaptitude mais simplement car ils n’en voient pas la nécessité.
Selon lui, la patience, plus fréquente chez les personnes nées avant l’ère numérique, viendrait du fait qu’une situation ennuyeuse peut aboutir à une récompense, à un plaisir inconnu jusqu’alors. Autrefois, les sources de distraction étaient moins nombreuses, c’est aussi pourquoi ces personnes ont développé une aptitude à supporter des occupations que l’on trouverait aujourd’hui mornes.
Les jeunes à l’heure actuelle ont tellement de choix de distractions, qu’ils peuvent facilement éviter l’ennui. D.W.pose alors la question : peut-on aujourd’hui apprendre la patience aux jeunes nés dans l’ère numérique et les convaincre que cette patience peut être récompensée ?
Il cite lexpérience de Jennifer Roberts, enseignante en histoire de l’art et de l’architecture à Harvard. Celle-ci a demandé à des étudiants de sélectionner une peinture dans un musée de Boston et d’écrire à son sujet une recherche approfondie. Ensuite, ils devaient se rendre au musée et étudier l’œuvre sur place pendant 3 heures.  La durée était, à dessein, excessive. Le but était que les étudiants pensent avoir tout vu dans cette peinture mais qu’en continuant à la regarder, ils réalisent que certaines choses malgré tout leur avaient échappé. Qu’ils réalisent en quelque sorte que la patience est récompensée.
Picture
J.Roberts a elle-même écrit à propos du peintre américain John Singleton Copley et a étudié une peinture intitulée Le garçon à l’écureuil volant.  Bien que de toute évidence, elle soit une fine observatrice des œuvres d’art,  elle a noté qu’il lui a fallu plusieurs minutes avant de remarquer la parenté entre la tache blanche de l’écureuil, la forme de l’oreille du garçon et le pli du rideau au-dessus de l’épaule gauche.
Voilà qui devrait nous faire réfléchir sur les moyens à mettre en œuvre avec les élèves pour qu’ils regagnent une attention soutenue. D.W pense que les élèves devraient ressentir le plaisir de découvrir un niveau d’accès insoupçonné sur un sujet donné. Ce n’est peut-être pas l’aptitude la plus importante du 21ème siècle mais selon lui, c’est celle qui manque le plus.
***
Tous les enseignants ont fait ce constat du manque de concentration, de la difficulté chez les élèves à rester concentrés sur la durée mais aussi du manque de continuité dans les activités y compris ludiques : l’effet zapping.
Il est clair que la concurrence est difficile entre les objectifs d’apprentissage à l’école et l’abondance de distractions à disposition. Mais c’est aussi le rôle de l’enseignant et plus généralement du questionnement pédagogique que de donner aux élèves le goût d’apprendre, le goût de découvrir et de toujours mettre en rapport le but obtenu avec les efforts fournis pour y parvenir, la patience par exemple.



vendredi 10 mai 2013

Questions fréquentes sur la PEx (n°10)

Quels courants politiques se cachent derrière la PEx ?

J’ignore si c’est une spécificité française mais il est difficile chez nous de parler pédagogie sans parler politique. Voilà donc une question récurrente. Pour beaucoup, il est très important de savoir à quel courant politique appartient une pratique pédagogique nouvelle avant même de s’y intéresser, avant même de considérer les résultats qu’elle donne. Tout comme s’il était bien plus important d’être en accord avec ses idées politiques que de considérer le rapport aux résultats. J’ai également remarqué à quel point les nouveautés suscitent la suspicion et se voient tout de suite accusées de connivence avec des partis ou personnes peu recommandables. Une fois de plus, nous sommes bien loin d’une attitude professionnelle qui consisterait à juger en fonction des résultats obtenus.

Que l’École soit un enjeu politique est tout-à-fait légitime car il s’agit de  s’interroger sur son rôle dans la société à laquelle on aspire. Néanmoins, il est abusif de faire de la pédagogie l’expression d’un courant idéologique. La pédagogie doit rester un outil au service des apprentissages définis par le ministère. Elle est un ensemble de compétences possédées par les enseignants pour y parvenir au mieux.

Avant d’aller plus loin et pour éclairer les éventuels lecteurs non avisés, je précise qu’en France le mouvement constructiviste est défini comme de gauche et tout ce qui repose sur une transmission des connaissances est réputé de droite. C’est un fait.

Je dois encore préciser que la PEx est souvent accusée de maux contradictoires. Les gens de gauche la soupçonnent d’être de droite en raison de son appartenance instructionniste. D’autres y voient une émanation constructiviste, au prétexte qu’elle réfléchit sur les pratiques pédagogiques (le camp dit des anti-pédagogistes). Mais il y a aussi la masse de tous ceux qui restent perplexes car ils ne parviennent pas à l’étiqueter. Et pour cause !

Voyons donc ce qu’il en est vraiment. Pour résumer, j’emprunte à E.D.Hirsch [1] une phrase qu’il avait l’habitude d’utiliser quand on lui demandait de situer son mouvement politiquement. Il disait : « Une ambition réputée de gauche (faire en sorte que tous les élèves apprennent mieux y compris ceux issus de milieux défavorisés) avec des moyens réputés de droite (une transmission directe de contenus conséquents).» Historiquement, la PEx se situe dans la recherche d’efficacité tangible pour les élèves des quartiers pauvres ; elle étudie les pratiques qui peuvent améliorer le mieux les résultats de tous les élèves et non pas uniquement de ceux issus de milieux culturellement favorisés. Avoir pour ambition d’atteindre tous les élèves implique que cette pratique se développe d’abord dans l’enseignement public, même si rien n’empêche l’enseignement privé d’en bénéficier lui aussi.

Depuis quelques années, la PEx a fait son apparition en France et commence maintenant à être connue. Le site Form@PEx participe à cette diffusion. Il a été créé dans ce seul but, suite à notre désengagement de l’association que nous avions créée en 2006. Chez Form@PEx, nous affirmons que la PEx n’est qu’un outil pédagogique au service d’un enseignement plus efficace. Form@PEx n’est lié à aucun mouvement politique que ce soit, ni de droite ni de gauche.

L’Enseignement Explicite n’est ni l’exclusivité ni la propriété de Form@PEx. D’autres enseignants, isolément ou collectivement, s’y intéressent également. A partir de là, tout est possible y compris la récupération politique. Ce que je peux affirmer aujourd’hui, c’est que le seul parti dont puisse se revendiquer l’Enseignement Explicite est celui de l’efficacité avérée et rien dans ses procédures, ses pratiques et même sa philosophie ne permet de lui attribuer une quelconque parenté avec un mouvement politique. C’est en tout cas la vision de Form@PEx. Toute éventuelle récupération politique serait à attribuer à ceux qui s’y seraient fourvoyés, en aucun cas Form@PEx.

Cet éclaircissement me semblait indispensable non pas pour dire le  bien et le mal, je n’ai pas cette prétention, mais afin que tout un chacun soit informé des tenants et des aboutissants de cette épineuse question politique et puisse faire ses choix en connaissance de cause.

A bientôt ici même pour une autre question.


 


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[1] Fondateur de la  Core Knowledge Foundation.Voir ici.

mercredi 8 mai 2013

Questions fréquentes sur la PEx (n°9)


L'Enseignement Explicite appartient-il au courant dit républicain ?

Le courant républicain (dit aussi anti-pédagogiste) est né d’une critique virulente du mouvement constructiviste (dit pédagogiste), à qui il reproche d’avoir cassé les idéaux républicains en créant une école inégalitaire, la date fatidique étant 1968. Curieusement, il prône le retour à une école traditionnelle tout en se réclamant de Jules Ferry, semblant ignorer que celui-ci, dans ses prises de position pédagogiques, a semé les idées qui sont à l’origine de l’École Nouvelle, et dont par ailleurs se réclament aussi, à juste titre, des personnes comme Philippe Meirieu. Pour exemple, un extrait : 

« Nous voulons des éducateurs ! Est-ce là être trop ambitieux ? Non. Et je n’en veux pour preuve que la direction actuelle de la pédagogie, que les méthodes nouvelles qui ont pris tant de développement, ces méthodes qui consistent, non plus à dicter comme un arrêt la règle à l’enfant, mais à la lui faire trouver ; qui se proposent avant tout d’exciter la spontanéité de l’enfant, pour en diriger le développement normal au lieu de l’emprisonner dans des règles toutes faites auxquelles il n’entend rien, au lieu de l’enfermer dans des formules dont il ne retire que de l’ennui, et qui n’aboutissent qu’à jeter dans ces petites têtes des idées vagues et pesantes, et comme une sorte de crépuscule intellectuel. Ces méthodes, qui sont celles de Froebel et de Pestalozzi, ne sont praticables qu’à une condition : à savoir que le maître, le professeur, entre en communication intime et constante avec l’élève. »[1]


Laissons donc le courant dit républicain à ses contradictions. Cela montre bien en tous cas les limites d’un positionnement politique sur des questions pédagogiques que l’on ne connaît pas. Je remarque au passage l’usage immodéré aujourd’hui de l’épithète républicain pour emballer nombre d’idées ou opinions, à tel point qu’il se vide peu à peu de son contenu. Il a supplanté l’usage du terme citoyen qui a eu lui aussi son heure de gloire.


On comprendra donc que l’Enseignement Explicite ne s’inscrive absolument pas dans ce courant ambigu. La critique adressée par l’Enseignement Explicite au constructivisme est uniquement d’ordre pédagogique et repose sur l’inefficacité des moyens de transmission indirects et peu guidés choisis par celui-ci. 

L'Enseignement Explicite fait partie des pédagogies efficaces et son seul but  est que tous les élèves effectuent au mieux leurs apprentissages, et ce, indépendamment de leurs milieux sociaux d’origine. Le seul épithète d’efficace lui convient très bien.


À bientôt ici même pour une autre question.





[1] Déclaration de Jules Ferry au Congrès pédagogique des inspecteurs primaire du 2 avril 1880.


dimanche 5 mai 2013

Questions fréquentes sur la PEx (n° 8)


"L'Enseignement Explicite n'appartient à personne."

Derrière cette remarque se cache la question d’une éventuelle propriété intellectuelle ; on trouvera peut-être déplacée une telle préoccupation en matière pédagogique. Il semblerait que le côté innovant de l’efficacité en pédagogie suscite des interrogations marchandes. Pour être plus précis, la remarque originale soulignait qu’aucun scientifique ni pédagogue ne pouvait s’en dire le propriétaire.

Je commencerai par préciser que l’Enseignement Explicite est une méthode spécifique, ayant été décrite avec précision et dont les procédures ne peuvent être confondues avec celles d’autres méthodes. Même si effectivement aucun brevet commercial n’a jamais été déposé pour l'Enseignement Explicite, il serait malhonnête de nier que c’est Barak Rosenshine qui en est le père historique : il l’a formalisée après de nombreux travaux expérimentaux. Le modèle qu’il a constitué est toujours valide ; c’est celui qui est appliqué dans nombre de classes aujourd’hui. Il continue d’être approfondi par de nombreux autres chercheurs et transmis par des enseignants en éducation ; d’autres études de grande ampleur viennent confirmer ses conclusions chaque jour. Pour le monde francophone, soulignons le rôle important des Canadiens Clermont Gauthier, Steve Bissonnette et Mario Richard,  qui font beaucoup pour sa diffusion jusqu’à la lointaine Europe (Suisse, France). Les sciences cognitives qui commencent à pénétrer le champ éducatif, nous permettent aujourd’hui de comprendre pourquoi ce modèle est efficace. On pourra citer dans ce domaine Sweller, Dweck, Willingham mais la liste n’est pas exhaustive.

L’Enseignement Explicite n’est pas sorti du néant, il n’est pas sorti du pragmatisme de quelques enseignants réunis dans une cafétéria pour échanger des recettes, il n’est pas sorti d’une utopie politico-sociale. Il est sorti des cerveaux de chercheurs qui ont passé des années à travailler sur la question dans des conditions parfois très difficiles[1]. La moindre des choses est de connaître les  noms[2] des plus importants d’entre eux, de reconnaître leur mérite, et de leur accorder la paternité de ce mouvement pédagogique, à défaut de leur en accorder la propriété commerciale.

Il faudrait bien plus d’une page pour retracer l’histoire de l’Enseignement Explicite mais on peut d’emblée dire que si un jour elle est écrite, de nombreux scientifiques et pédagogues s’en verront attribuer une part de la paternité.


           

           A bientôt ici même pour une autre remarque. 







[1] Lire par exemple  l’histoire du projet Follow Through racontée en détails par S.Engelmann.
[2] Il est impossible ici de donner une liste exhaustive de tous ceux qui ont contribué à parfaire l’Enseignement Explicite. Ceux qui sont intéressés les retrouveront sur le site Form@PEx.