Dans cette vidéo, John Hattie[1]
explique brièvement mais de manière non polémique que l’enseignement explicite
est de loin le plus efficace pour des apprentissages réussis. Voici les éléments de son discours.
Il part d’une image qu’a tout enseignant en entrant dans sa
classe. L’enseignant explicite doit se considérer comme l’agent de changement
chez l’élève. Alors que l’autre type d’enseignant se verra plutôt comme le
facilitateur par découverte. Les données probantes sont unanimes pour dire qu’il
y a une différence énorme entre les deux au niveau de résultats.
J.Hattie explique qu’il n’a aucun problème à l’égard du
constructivisme comme modèle d’apprentissage, mais ne peut le considérer comme un modèle d’enseignement. Ces deux
paradigmes sont depuis longtemps confondus et ce malgré le manque de données
pouvant les assimiler. Il souligne une fois de plus que les données probantes
révèlent que si l’on veut que les élèves construisent, découvrent facilement, alors la manière explicite s’impose,
celle qui fera de l’enseignant un agent de changement. Mais pour enseigner,
rajout-t-il, il faut savoir aussi se tenir en retrait et écouter.
Ensuite, il s’attarde sur l’exemple précis de l’enseignement
de la lecture et rappelle que les élèves en difficulté n’apprennent pas à lire
en lisant ; ils apprennent quand on leur enseigne les stratégies et
habiletés utiles pour la lecture. Lors de ses visites dans les écoles, il se
dit choqué de voir parfois des élèves non lecteurs en situation de faire un
travail de recherche en bibliothèque. Comment pourront-ils apprendre si de plus,
la lecture est une chose désagréable pour eux ? La lecture a vraiment
besoin d’un enseignement explicite.
Il évoque enfin l’un de ses récents travaux portant sur l’étude
de l’effet de Saint Mathieu [2]en
enseignement. Il explique que les lecteurs précoces progressent et que les
autres stagnent.
Il se dit très favorable aux programmes de la seconde chance,
même si lors d’études menées en Caroline du Nord, il a constaté certaines
limites : la deuxième année, bien souvent, les enseignants n’enseignaient
plus les habiletés spécifiques de la lecture. Au lieu de cela ils aidaient les élèves non lecteurs à faire le travail requis,
sans passer par la lecture. Bien sûr, cela perpétue le problème. La lecture
nécessite la maîtrise d’habiletés particulières telles que phonologie,
conscience phonémique, rythme. L’apprentissage de l’écoute est très important
dans l’enseignement de la lecture : écouter attentivement un son et le
mettre en rapport avec ce qui est écrit. Cela est une habileté très spécifique.
Enfin, il conclut en ajoutant qu’enseigner est aussi une
action spécifique. Et que l’enseignant
qui entre en classe persuadé qu’il est un agent de changement a plus de chance
de réussir que celui qui se voit comme le « guide à côté »
(expression anglaise résumant la position de l’enseignant en mode
constructiviste : guide by the side).
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Cette brève présentation met le doigt sur ce qui a été une
erreur du mouvement constructiviste : assimiler le paradigme de l’apprentissage
à celui de l’enseignement. En effet, même si l’idée a une apparence de logique,
rien n’a jamais prouvé que la manière d’enseigner doive se calquer sur celle d’apprendre.
Ce n’était qu’une hypothèse de départ. Elle aurait être vérifiée avant d’aller
plus loin. Mais cela n’a pas empêché les partisans du constructivisme de construire
toute une pédagogie autour de cette idée. À la lumière de la recherche récente,
il n’est pas surprenant que les résultats n’aient pas suivi. Des chercheurs comme
Kirschner, Sweller, Clark ont clairement établi, comme le souligne J.Hattie
tout au long de ce clip, qu’un apprentissage réussi passe par un enseignement
explicite et structuré, en adéquation avec l’architecture et le fonctionnement
cognitifs.
[1]
John Hattie est professeur à l’Université d'Auckland (Nouvelle-Zélande),
spécialiste de la mesure et de l’évaluation. Il a publié en 2009 une
méga-analyse sur la réussite scolaire, portant sur les résultats de plus de 800
méta-analyses qui, au total, regroupent quelque 52 000 recherches concernant
des millions d’élèves de plusieurs pays sur une période de 15 ans.
[2] Selon le
verset biblique « Car on donnera à
celui qui a, et il sera dans l'abondance ; mais à celui qui n'a pas, on
enlèvera même ce qu'il a. » Mathieu 13, 12
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