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mardi 4 février 2014

Pauvreté et réussite scolaire

Voici un intéressant article, trouvé sur le site de BBC news education expliquant qu’Andreas Schleicher, de l’OCDE, casse le mythe selon lequel les élèves pauvres réussiraient moins bien que les élèves favorisés. Ce statisticien chercheur en éducation, est le chef coordonnateur de la division PISA de l’OCDE. Il s’appuie sur les derniers résultats parus.

A.Schleicher s’est intéressé aux performances des élèves les plus démunis économiquement et les a comparées à celles des élèves riches. Il observe un chevauchement des deux.

« Les 10 % d’élèves les plus pauvres de Shanghai sont aussi performants que les 20% d’élèves privilégiés au Royaume Uni ou aux États-Unis.

En Europe, les Pays Bas ont les plus hautes performances parmi les familles les plus démunies. Les élèves pauvres néerlandais sont aussi bons en maths que les adolescents français issus de milieux bien plus aisés.

Les élèves les plus pauvres de Hong Kong ont un niveau de réussite supérieur à celui d’élèves bien plus riches de Suède et de Norvège. »

Au vu de ces données, il soutient que l'on ne doit plus excuser systématiquement les différences de performances au prétexte d'un environnement socio-économique défavorable. Selon lui, l'impact de la pauvreté sur la réussite scolaire est largement surestimé.

En effet, depuis des années, on déplore l’échec des élèves issus de milieux défavorisés et l’on en impute la responsabilité à leur état de pauvreté. Cela évite une réflexion plus approfondie sur l’impact des méthodes pédagogiques et transforme un problème pédagogique (nous ne parvenons pas à instruire nos élèves correctement) en un problème socio-économique ; l’éventuelle solution consisterait à éradiquer la pauvreté dans le monde, ce qui ne relève plus du champ d’action de l’école. La messe est dite.

C’est un fait intangible que les enfants issus de milieux défavorisés réussissent moins bien à l’école ; nul ne songe à le nier. Néanmoins, ces enfants-là ont les mêmes capacités cognitives que les autres, les travaux utilisant l’imagerie médicale l’ont montré. Par contre, ils n’ont pas un environnement stimulant ; comme l’explique S.Dehaene, « faute de livres, leur vocabulaire est réduit ; faute de jeux intelligents, leur flexibilité cognitive est réduite. »

PISA nous dit qu’il existe des élèves pauvres capables des mêmes performances que les élèves des pays riches. Par conséquent, il faudrait peut-être se pencher sur les méthodes utilisées dans ces pays au lieu de les disqualifier a priori. Nous savons grâce aux recherches intensives (mais maintenues sous le boisseau) menées sur plusieurs décennies que tout ne se vaut pas en pédagogie et que les méthodes les plus recommandées ne sont pas forcément les plus efficaces. Certaines méthodes portent leurs fruits, y compris pour les élèves issus de milieux défavorisés. Pour citer l'étude la plus connue, rappelons-nous du projet Follow Through, qui a comparé les effets de plusieurs approches pédagogiques.

Les pays riches se lamentent depuis nombre d’années sur les défaillances d’un système éducatif inopérant ; depuis nombre d’années, les mêmes solutions (innovation, injection de fonds et projets tous plus farfelus les uns que les autres dont l’efficacité n’a jamais été prouvée) sont proposées, comme si par miracle elles pouvaient donner d’autres résultats. Total, nous sommes dans un système extrêmement injuste et élitiste, qui instruit seulement ceux dont les familles sont déjà instruites et cultivées. Tout cela car l’idéologie guide les décideurs et qu’aucun d’eux n’a le courage politique de mettre un terme à cet état de fait. On peut se tromper une fois, mais quand cela dure depuis des années et que rien n’est fait pour changer les choses alors que les données probantes sont légions en matière éducative, il est légitime de s’interroger sur la nature de notre société. Que dirait-on d’un état qui posséderait un médicament pour soigner une maladie et qui ne le mettrait pas sur le marché ?

Lorsque les « champions » de PISA sont issus de pays dans lesquels le modèle pédagogique est « convenable » (à dominante constructiviste), on les porte au pinacle. Que n’a-t-on pas dit et écrit au sujet de la Finlande [1]il y a quelques années ?  Mais curieusement, lorsque ce sont des pays asiatiques qui réussissent, (dont les modèles pédagogiques ne sont pas « convenables ») alors immédiatement, on remet en question le test, l’échantillonnage ou le comptage… Bref, la politique éducative consiste encore et toujours à critiquer le thermomètre quand ses indications ne conviennent pas au modèle imposé et si possible, à le casser.


PS Il est à signaler tout de même que très récemment, l'Enseignement Explicite a fait sa rentrée officielle dans les textes du référentiel pour l'éducation prioritaire. Je me plais à y voir un signe positif et attends impatiemment sa mise en oeuvre. 





[1] Entre autres beaucoup de bêtises et d’interprétations erronées. 

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