Pour
tous ceux qui s’intéressent à l’enseignement explicite, ou à l’enseignement
basé sur les données probantes (EBP), on ne présente plus John Hattie. Pour les
autres, ils pourront se référer à cette présentation et comprendront vite toute l’importance de ce chercheur sur la question des
données probantes en enseignement.
Son
ouvrage, Visible Learning, fruit de
ses travaux sur une quinzaine d’années, présente une synthèse de méta-analyses
: 50 000 études et des millions d’élèves concernés. L’ouvrage n’a pas pour but de noyer le lecteur sous un flot de
données incompréhensibles aux non-initiés, il délivre des conclusions qui s’appuient
sur des données mesurées et mesurables. Le but n’est pas de critiquer les
enseignants et de constater à quel point ils sont mauvais mais simplement de
mettre en évidence le besoin d’un outil pour mesurer ce qui marche le mieux dans
l’enseignement, afin de guider vers l’excellence. John Hattie se plaît à
répéter que la question la plus importante que doit se poser un enseignant est
celle qui consiste à se demander quel impact son action a eu sur les
apprentissages.
Je
me propose non de résumer cet ouvrage très complet, mais simplement de lister
les idées phares qu’il contient afin que tout un chacun puisse en évaluer l’apport
dans la marche vers un enseignement efficace.
- Nous avons besoin d’un baromètre de ce qui marche le mieux, et un tel baromètre doit pouvoir établir un guide de ce qui est excellent. C’est l’objectif de Visible Learning que de construire ce baromètre.
- L’ouvrage propose un modèle d’enseignement et d’apprentissage efficaces basé sur des milliers d’études. C’est le paradigme de l’orientation pédagogique basée sur les preuves.
- Une grande partie de l’ouvrage raconte la puissance de l’enseignement direct, mettant en évidence l’importance du feedback pour informer l’enseignant du succès ou de l’échec de sa procédure. Autrement dit de la nature de son impact sur l’apprentissage de l’élève.
- On parle d’enseignement et l’apprentissage visibles quand, ensemble, l’enseignant et l’élève cherchent à établir si et dans quelles mesures, l’objectif d’apprentissage a été atteint.
- L’ouvrage parle du pouvoir d’enseignants passionnés et chevronnés sur l’engagement cognitif des élèves et sur les contenus enseignés. Le guidage, l’évaluation des progrès mènent à la puissance du feedback de l’enseignant vers les élèves mais aussi des élèves entre eux.
- L’enseignement efficace se produit quand l’enseignant décide des objectifs d’apprentissage, des critères de réussite, les rend transparents aux élèves, fait des démonstrations par modelage, évalue le degré de compréhension de ce qui a été expliqué par une vérification régulière, et par une synthèse de ce qui a été enseigné lors de la phase d’objectivation.
- Trop souvent, l’enseignement direct est décrit comme mauvais, alors que l’enseignement constructiviste serait bon. Cette affirmation est fausse et en complète opposition avec les données relatives à un enseignement et un apprentissage efficaces.
- Ces résultats montrent qu’un enseignement guidé est bien plus efficace qu’un enseignement peu ou pas guidé. Le rejet de l’enseignement direct est typique d’une profession immature, qui manque cruellement de solides bases scientifiques et rejette les données probantes, leur préférant les opinions et l’idéologie.
Pour terminer,
quelques implications pratiques pour l’enseignant en recherche d’efficacité.
- Donner de multiples occasions de pratique.
- Établir un lien visible entre objectif d’apprentissage, critères de succès, activités, ressources.
- Inciter à la pratique volontaire et à la concentration.
- Enseigner aux élèves comment demander, comprendre et utiliser le feedback.
- Reconnaître l’importance du feedback entre élèves et l’enseigner.
- Guider les progrès, régulièrement, toute l’année.
- Évaluer l’impact de l’enseignement, les progrès des élèves et faire son possible pour maximiser l’impact.
- Être directif.
- Rendre clairs les objectifs d’apprentissage et les critères de succès jusqu’à ce qu’ils soient explicitement compris par tous.
- Avoir conscience que ce sont les efforts des élèves, et non leur degré d’intérêt dans l’activité, qui sont importants.
- Être attentif à ce que chaque élève pense et sait.
- Connaître la quantité et la qualité de feedback nécessaire dans le processus d’apprentissage.
- Développer une bonne connaissance du contenu afin de fournir un feedback utile.
- Se souvenir du message fondamental de la recherche : connaître l’impact de ses actions.
L’enseignement
direct et efficace tel qu’il est décrit par J.Hattie est l’Enseignement
Explicite tel qu’il a été mis en forme et décrit par B.Rosenshine. Voilà donc
une étude de plus, et non des moindres, prouvant toute l’efficacité de cette
pratique. Si l’Enseignement Explicite
reste encore une pratique marginale ici en France, cela vient du fait que les
données probantes n’ont toujours pas leur place en pédagogie ; les « éducrates »
qui disent le vrai du faux en haut lieu n’en veulent pas et s’appliquent à
formater l’esprit des exécutants que sont les enseignants, en diffusant un
certain nombre de légendes telles que, par exemple, croire que l’Enseignement
Explicite serait une procédure nuisible car « elle empêcherait l’enfant de
penser ». Force est de constater qu’il y a encore du chemin à faire pour
que soit admise l’idée d’un enseignement direct, explicite et structuré et pour
que nous passions enfin d’un âge obscur des croyances pédagogiques à celui plus
éclairé des données probantes.
Pour
en savoir plus sur John Hattie :
En somme, ce livre conseille l'utilisation massive de feedback, des objectifs clairs, et une forte guidance. Rien de bien nouveau, en somme : les études qui montrent l’efficacité de ces pratiques behavioristes/méta-cognitives sont légion.
RépondreSupprimerDans le même genre, on peut aussi lire le livre "Classroom Instruction that Works", écrit par Marzano, R et ses collègues (2001), qui montrait exactement la même chose. Cette dernière montrait aussi l'efficacité d'autres techniques, certaines provenant des pédagogies constructivistes (version constructiviste cognitif, et pas socio-constructivisme) et d'autres plus classiques :
-activation des connaissances antérieures,
-liaison des nouvelles informations avec les connaissances antérieures,
-advances organisers,
-test d’hypothèse ;
-entrainement d'attribution,
-répétition,
-analogies,
-usage de graphiques et de schémas,
-prise de notes et fabrication de résumés.
Vous semblez déplorer l’abondance d’études montrant l’efficacité de certaines pratiques pédagogiques. Ce n’est pas mon cas. Plus il y en aura, plus il y aura de chances de faire connaître ces pratiques et de les affiner. Vous minimisez l’impact dans le monde de la recherche des travaux de John Hattie, au prétexte qu’il « n’aurait rien inventé ». L’« invention » n’était pas le but, il s’agissait pour lui de faire une synthèse de méta-analyses. John Hattie est unanimement reconnu dans la communauté scientifique internationale et ses travaux font maintenant référence. Par conséquent, je ne peux que vous inciter à faire une lecture attentive de Visible Learning, afin que votre critique soit plus solidement étayée.
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