L’école ne réussit pas
à instruire les élèves. Les ministres se succèdent, ainsi que les réformes et
autres refondations qui nous annoncent le bout du tunnel ; néanmoins, rien
ne change. Serait-ce une malédiction qui s’attarderait sur l’Éducation
Nationale depuis plusieurs décennies ?
Voici, depuis la base, une
première remarque, issue de mes années de pratique enseignante, de mes
questionnements et de mes observations de terrain. C’est un point de vue
personnel, non exhaustif. D’autres viendront dans les prochains posts.
En toutes choses, il
faut commencer par les objectifs[1]. C’est ce que l’on apprenait
autrefois aux enseignants. Quel est l’objectif de votre leçon ? Ici, il
s’agit de l’objectif de l’École. De manière insidieuse, cet objectif a changé
au fil du temps. On est passé de l’instruction à l’éducation et à
l’épanouissement personnel de l’élève. Je sais bien que cette mutation a eu
lieu en réaction à l’enseignement traditionnel magistral qui, certes, avait ses
limites. On a décrété que l’enseignement traditionnel, centré sur l’instruction,
était trop dur dans ses formes, trop rigoureux, trop sévère, trop exigeant dans
ses contenus. En conséquence, on s’est imaginé, par un raisonnement simpliste,
qu’en modérant l’instruction, en la faisant passer au second plan et en misant
sur le bien-être de l’enfant, les choses changeraient, tout en collant à
l’esprit du temps. Ce faisant, on a jeté le bébé avec l’eau du bain.Par conséquent, nous
avons aujourd’hui une école qui, sans le revendiquer, a relégué l’instruction
au second plan, selon le principe erroné qu’instruire empêcherait l’épanouissement
de l’enfant et la formation du futur citoyen. Il n’est qu’à regarder pour s’en
convaincre, le projet d’évaluation des enseignants, que la précédente ministre souhaitait
mettre en œuvre ; la grille d’évaluation des
enseignants, qui contient 11 items, donne une idée du changement de cap des objectifs
de l’École et par conséquent de la nouvelle nature du métier d’enseignant.
Voilà une école qui
n’est pas à une contradiction près : elle dénigre l’instruction, mais fait
croire aux parents que leurs enfants ont un bon niveau, par le principe
novateur de l’évaluation bienveillante ; et bien entendu, se lamente sur
les piètres résultats aux évaluations internationales car ils donnent à voir l’étendue
des dégâts. Voilà une école qui s’entête dans ses principes et qui refuse
encore et encore de tenir compte du réel. Il serait temps que
soient clairement définis les buts principaux et secondaires de l’École en y
associant la liste exhaustive des moyens permettant de les atteindre.
Personnellement, je
pense que l’École publique doit former un citoyen éclairé et cela passe par une
solide instruction. L’esprit critique et l’aptitude à raisonner ne s’acquièrent
qu’à partir d’un contenu. Sinon, il s’agit de « formatage » des
esprits et d’endoctrinement. L’instruction, ou but secondaire, s’acquiert grâce
à des méthodes d’enseignement dont l’efficacité est avérée : les méthodes
pédagogiques doivent s’appuyer sur des données probantes et tangibles et non
sur des hypothèses ou, pire encore, sur des principes idéologiques. Tout comme
un médecin s’appuie sur les données scientifiques pour choisir la thérapie la
mieux appropriée, l’enseignant devrait choisir la méthode pédagogique la plus
efficace pour instruire ses élèves. Cela sous-entend bien sûr qu’il en ait une
bonne connaissance et nous renvoie à la question de la formation initiale et
continue. Sur cette comparaison médicale, on pourra lire l’excellent texte de Diane Ravitch qui, sur le mode
humoristique, expose la triste réalité des choses.
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