En
ce 5 juillet, j’aurais souhaité écrire un billet un peu plus léger mais hélas,
l’actualité m’oblige à terminer l’année scolaire sur une note de profonde
tristesse. Un parent d’élève d’une école d’Albi a assassiné une collègue
enseignante sur son lieu de travail, devant les élèves, mettant fin à sa vie d’une
façon atroce et douloureuse.
Vendredi
4 juillet, dernier jour de classe de l’année scolaire, Fabienne, sans aucun
doute, s’était rendue à son travail le cœur léger. Le dernier jour de classe
est dans l’année un moment à part que les élèves apprécient particulièrement,
ainsi que les enseignants. Tout le monde
est détendu, c’est le jour des petits mots, des échanges d’adresses, des
au revoir, des remerciements parfois. C’est le moment où l’enseignant fait le
bilan de son année, se réjouit du travail accompli, même s’il n’est pas aisé
tous les jours. Fabienne n’a pas eu l’heur de vivre ces instants, en guise de
remerciement, c’est la mort qui l’attendait par le coup de couteau d’une mère d’élève.
La
communauté enseignante est abasourdie. À cette tristesse s’ajoute une réelle amertume.
Les
indignations, consternations, et autres protestations officielles ne changeront
rien au fait que ce triste événement n’est pas sans rapport avec la dégradation
des conditions du métier, déconsidéré, privé de son autorité ; des écoles
moulins à vent, dans lesquelles les parents rois circulent librement, leur statut de parent d’élève
leur ouvrant toutes les portes.
Le
traitement par la presse est inconvenant. Les journalistes n’hésitent pas à parler
de « présumé meurtrière », alors que le crime a été commis dans un
lieu public, devant quantité de témoins. Puis comme pour minimiser la chose, reprennent
en chœur l’argumentaire officiel : l’auteur avait des antécédents
psychiatriques : cela est-il une circonstance atténuante ? Cela
diminue-t-il la gravité de l’acte ? Si cela s’avère exact, alors nous
sommes en droit de nous demander pourquoi un individu présentant un tel danger
pour la société était en libre circulation et avait de plus le droit de pénétrer
dans une école ?
Puis,
pour bien enfoncer le clou, les medias, porte-paroles des instances, nous
expliquent que ce type d’événement est
très rare, statistiques à l’appui. Comme si la rareté pouvait édulcorer l’acte.
Ce qu’ils oublient de souligner, c’est que, même si effectivement les meurtres ne
sont pas encore fréquents, les agressions, violences et harcèlements émanant de
parents d’élèves le sont de plus en plus, tout particulièrement en Primaire
(voir le tout dernier
rapport de l’Insee). Curieusement, cela n’intéresse guère les journalistes.
Enfin,
pour couronner le tout, les journaux de 20 heures, à l’unisson du cynisme,
faisaient hier soir leur une sur la défaite de l’équipe de France de football au
mondial. Quand une société en est arrivée à ce niveau de détestation, de dénigrement de son école publique, de ses
enseignants, et finalement de ses élèves, comment peut-on croire toutes les intentions
et belles paroles des dirigeants qui disent vouloir « protéger l’école mais sans toutefois la fermer». Benoît Hamon qui s’est immédiatement rendu sur
place a déclaré : « Cet acte ne doit pas faire oublier que dans cette école, on a mené à bien un projet éducatif, réussi à dialoguer avec les parents...» Il est des moments où la parole devient indécente.
Toutes mes pensées vont à Fabienne et à ses proches.