L’Enseignement Explicite tel que je l’ai pratiqué et tel que j’ai voulu le diffuser en France, pénètre aujourd’hui par la grande porte dans le milieu éducatif français, avec la conférence de Steve Bissonnette à la Sorbonne devant 1000 personnes. Je ne peux que m’en réjouir.
Nous sommes
en 2023 et c’est en 2006 que mon époux et moi avons commencé à militer pour
l’Enseignement Explicite, celui défini par Barak Rosenshine. Il y a 17 ans. C’est
à dessein que j’utilise le terme militer car il s’est bien agi d’un
engagement actif pour une idée, celle d’enseigner avec efficacité ; le parcours
a été semé d’embûches tant l’idée allait à contre-courant de la pensée
pédagogiquement correcte socio-constructiviste alors implantée dans le milieu
éducatif. Hostilité de la part des apparatchiks
pédagogistes, hostilité de la part de nombre d’enseignants, mais aussi, hostilité
aussi de la part d’enseignants partisans d’un retour à l’école de Ferdinand
Buisson… Je ne reviendrai pas sur l’aspect idéologique de la chose, excellement résumée par
le chercheur américain Carnine, qui parlait en 2000 d’une profession « manquant
d’une base scientifique solide et ayant moins de respect pour les preuves que
pour l’opinion et l’idéologie. »
Dès le début
de notre engagement, nous avons entretenu des liens féconds avec Clermont
Gauthier, Steve Bissonnette et Mario Richard. Nous avons créé une association
pour faire connaître cette pratique pédagogique aux enseignants et à
l’institution, avec un site Internet contenant de nombreux documents. Notre
association, reconnue par le ministre Darcos en 2007 a œuvré activement
jusqu’en 2010, année où elle a invité Steve Bissonnette et Mario Richard à
animer un stage pour les enseignants qui, s’est révélé un franc succès. Mais
c’est aussi l’année où nous avons quitté l’association en raison de désaccords
majeurs sur les inflexions souhaitées par l’équipe dirigeante, lesquelles s’éloignaient de nos engagements initiaux. Par la suite, nous avons
décidé de nous consacrer uniquement au site, devenu Form@PEx ; celui-ci s’est
encore enrichi et a vu sa fréquentation augmenter, devenant ainsi la référence francophone
en la matière.
Au total, il
y a eu des avancées, même si elles n’ont pas été aussi
rapides et nombreuses que nous l’aurions souhaité. Elles ont eu un prix : des
attaques, de l’incompréhension, du mépris, mais aussi, il ne faut pas l’oublier, des encouragements dont les plus remarquables sont les résultats en salle de
classe. Cette agressivité, dont on se souvient facilement, n’était-elle
pas le signe que l’Enseignement
Explicite représentait une menace concurrentielle pour les partisans des
méthodes non efficaces ? à tel
point que l’adjectif explicite a été récupéré par le courant
constructiviste qui se targue maintenant d'« enseigner plus
explicitement », ce qui n’est selon l’expression de Steve, qu’un
déguisement socioconstructiviste.
En 2019,
lors du symposium sur l’Enseignement Explicite à Montréal, je faisais un état
des lieux sur la situation en France et je concluais à des avancées malgré un
terrain très défavorable, celui de l’enracinement dogmatique au niveau
décisionnel ; et je me réjouissais que la contrefaçon du terme explicite
opérée par le mouvement socioconstructiviste qui, si elle n’était pas encore la
rançon du succès, en était peut-être le signe annonciateur.
Alors,
aujourd’hui l’Enseignement Explicite, celui de Rosenshine, fait son entrée à la
Sorbonne, enfin ! J’aurais aimé que cela se produise plus tôt. Je ne suis pas dans les coulisses de cette avancée mais j’aime à penser que la graine que Bernard
et moi avons semée et arrosée consciencieusement avant de la laisser faire, est
en train de porter du fruit.
Interview de Steve
Bissonnette – Un jour un chercheur
Conférence de Steve Bissonnette
Françoise Appy 29/12/2023
Bonjour.
RépondreSupprimerOn me dit du grand bien à propos de l'enseignement explicite de Bissonnette, Rosenchine et Richard et du fait qu'il soit validé par les données probantes. Après, concrètement, quelles notes les élèves obtiennent-ils? Tous auront 20/20? Au bout de combien de temps?
Au bout de combien de temps cela fonctionne-t-il pour les élèves en difficulté? Ont-ils tous 20/20 dès le début ou bien passent-ils par exemple de 07/20 à 11 d'ici un an?
Je veux bien concevoir que c'est important de s'appuyer sur les outils statistiques des méta-analyses. Cependant, cela n'a pas l'air concret. Les tailles d'effet n'estiment pas une fourchette de notes que chaque niveau d'élève aura (élèves très bons, élèves moyens et élèves en difficulté).
Cordialement.
Encre-et-soupirs
Les résultats sur le terrain ne sont pas une vue de l’esprit et l’Enseignement Explicite n’est pas une séance de magie. Les élèves faibles et moyens en sont les premiers bénéficiaires. Une leçon en Enseignement Explicite conduit forcément à la compréhension puisque l’on ne passe pas à la pratique autonome si au moins 80% des élèves n’ont pas compris, l’enseignant est « obsédé » par la compréhension et la vérifie très souvent par divers moyens. Effet encore accentué quand tous les enseignants de l’école pratiquent cette même pédagogie. Il faut aussi réfléchir aux raisons pour lesquelles bien souvent les élèves ne comprennent pas, et en particulier sur les connaissances pré-requises, sur lesquelles va s’appuyer la nouvelle notion. Regardez le schéma détaillé d’une leçon, mettez en pratique et vous pourrez vous faire votre propre opinion.
RépondreSupprimerJe peux vous assurer que pour moi ce fut du concret dans ma classe. Cordialement,