Il y a quelques semaines, je déplorais l'obole envisagée par le ministre de l'Education Nationale pour les enseignants du primaire. Depuis, les choses ont changé et un nouvel épisode nous est livré aujourd'hui.
Vincent Peillon accorde une prime aux enseignants du primaire d’un montant de
400 € par an, pour réparer « l’injustice » de traitement entre
enseignants du secondaire et enseignants du primaire relativement à l’ISOE. Notons au passage que notre ministre se fait une curieuse idée de la notion de
réparation, l’ISOE des professeurs du secondaire étant de 1200 € par an, c’est-à-dire
3 fois plus.
Vincent Peillon a donc changé
d’avis ; il avait en effet suggéré le 28 avril que la prime friserait
plutôt les 90 € par an, en raison de la crise.
Serait-ce la parution du dernier rapport
de l’OCDE avec une note consacrée à la France, qui lui a suggéré un tel geste ?
En tout cas, ayons une pensée
émue pour les épiciers du ministère qui ont eu fort à faire pour racler les fonds de tiroirs : quelques
milliers d’euros récupérés grâce à la suppression de la prime d’évaluation
accordée aux enseignants de CE2 et de CM1, quelques millions pris sur la
suppression des stages de remise à niveau, plus quelques autres millions sur divers
«reliquats de 2012 », encore d’autres dans le gel des salaires. Peut-être
faudrait-il aussi inclure dans ces comptes d’apothicaires, la volonté du ministre de
diminuer de 316 € mensuels le salaire des débutants.
Voilà qui donne l’impression
d’une refondation improvisée et bricolée selon les aléas du jour. Quel sérieux
peut-on accorder à ce qui se dit une véritable révolution du système scolaire
et qui n’a même pas prévu à l’avance son financement. Et l’aspect financier
hélas n’est que la partie émergée de l’iceberg, tout le reste étant à
l’avenant. A ce stade, on n’est même plus dans le bricolage, on est dans le
mauvais rafistolage.
Tout cela montre comment le ministère considère les enseignants du primaire. Mais au fond, peut-on honnêtement lui en faire
grief ? En effet, si on en croit la récente
enquête menée par l’UNSA sur les métiers de l’éducation, environ la moitié
des interrogés ressentent de la reconnaissance et du respect dans leur pratique
(44%), 84% sont heureux de leur métier,
42% trouvent leurs conditions de
travail satisfaisantes, même si par ailleurs ils sont 58,76% à estimer que
l’amélioration du pouvoir d’achat devrait être la première priorité.
Cela fait des années que les
enseignants du primaire sont déconsidérés y compris par leur ministère ;
certes, il leur arrive d’exprimer leur agacement par quelques grèves de-ci
de-là, mais au fond, rien de bien méchant. Ils ont avalé les réformes
successives docilement, les ont parfois accompagnées d’un œil bienveillant et
les questions salariales, même s’ils déplorent la baisse du pouvoir d’achat, ne
sont pas leur préoccupation principale. C’est normal quand on choisit ce métier
par « vocation » comme le montre le sondage du SNuipp sur les jeunes
enseignants (c'est le cas pour 73% d'entre eux).
Reste à voir si cette prime sera
pérenne ou si elle ne durera que l’instant d’une promesse, comme ce fut si
souvent le cas par le passé. Quelque chose me dit qu’elle sera insuffisante à
rattraper le décalage salarial des enseignants français avec leurs collègues de
l’OCDE : ils gagnent en effet 11 % de moins par rapport à la moyenne. Pas plus qu'elle ne mettra fin à l'injustice de traitement entre enseignants du primaire et enseignants du secondaire.